American Weddings Par ses clichés, Philippe Dollo a décidé de prendre le contre-pied de la photographie traditionnelle de mariage qui organise et met en scène, force les intéressés à prendre des poses et par cet artifice prétend traduire l’importance et la solennité de l’événement. Dollo se veut invisible. Il est l’œil qui se glisse et se faufile pour traquer ces brefs instants de complicité, de doute, d’embarras, d’inquiétude ou de confrontation noyés dans l’enchaînement rapide d’une journée très particulière, ce passage unique dans l’histoire d’un couple, ce rassemblement d’êtres proches qui ne se reproduira plus. Dollo veut à tout prix éviter une reconstitution picturale des étapes convenus du mariage ; il veut échapper aux stéréotypes ; il veut accéder à ce qu’il a de plus poignant dans un cérémonial qui a perdu de son charme, discrédité parce que jugé trop conventionnel par l’époque. C’est donc par la spontanéité, par les détails insolites de ses clichés que Dollo refait surgir l’émotion et rappelle que le mariage est bien plus qu’une accumulation de gestes prémédités. Dollo considère ses photographies de mariage comme un véritable travail artistique, un défi, une traque. C’est le mariage comme il le conçoit, comme il l’a lui-même vécu, « cette cerise sur le gâteau de l’amour conjugal », qu’il veut illustrer. Mais il opère aussi pour les principaux intéressés, ces mariés pour qui la journée aura passé trop vite et qui, submergés par la tension et l’effervescence, n’auront pas eu suffisamment d’yeux pour tout voir. Céline Curiol